Chökhor Ling

Enseignements

Nagarjuna Comprendre comment fonctionne Esprit

Rester relié

Par Vén. Gelek Drölkar

Le temps passe qui emporte chaque instant sans laisser d’autres traces que le souvenir et l’apparence plus ou moins manifestée d’un vécu promptement effacé. Mais où passent nos histoires de vie, d’un jour à l’autre ? Dans quel monde inconnu déposent-elles leurs empreintes ? Est-il bien nécessaire de regretter l’inexistant ? Où peut-on retrouver ce qui semble tant nous manquer lorsqu’un événement bienheureux s’est dilué dans le passé ? Le sujet ici concerne directement nos expériences de vie spirituelle.

Comme déjà maintes fois soulignée, la prise de refuge reste le pilier central de tout accomplissement sur le chemin bouddhiste. Mais une fois la cérémonie passée, lorsque les flammes des bougies se sont éteintes, que l’on s’éloigne du temple pour revenir au quotidien, que reste-t-il de la splendeur de cet instant sacré ? Aucune trace visible certes, mais une force ranimée au fond de la conscience qui se souvient de sa réalité. Sans la continuité de cette bénédiction et sans son entretien, la fausse puissance des apparences reprend ses droits sur les esprits. Petit à petit, sous la pression des tendances habituelles qui portent à croire à l’illusoire, la clarté du refuge s’estompe, laissant la place aux feux de pacotille et à l’hypnose collective. Dans le tourbillon des activités samsariques, chacun se prend au jeu dévastateur de l’attachement immodéré pour ce qui à peine saisi glisse déjà entre les doigts. Certaines prises de conscience font revenir aux enseignements. Si la “chance” passe par là sous la forme d’un maître, nombre d’aspirants au bonheur se pressent pour recevoir bénédictions et initiations. Des foules attentives se rassemblent autour de la parole inspirée des plus hauts dignitaires bouddhistes et courent au-delà des frontières dans l’espoir de goûter le nectar du sacré. Mais il est toujours un moment où l’on revient au point d’où l’on est parti.
Le refuge, les initiations, toutes les bénédictions accompagnent le quotidien jusqu’à le devenir. L’Éveil est constamment présent et sa voie passe par le chemin de toute existence, au travers des plus petits faits de la vie jugés parfois insignifiants. Si la nature des phénomènes quels qu’ils soient est soumise à l’impermanence, celle de notre bouddhéité demeure dans l’attente de sa reconnaissance. Et s’il est profondément utile de rechercher les meilleurs moyens d’avancer, la pratique est celui qui permet de rester relié à la sagesse en nous. Chaque initiation nous ramène à sa connaissance comme une renaissance, mais sans la pratique, le relais s’estompe et finit par s’endormir à nouveau.
Là où nous sommes se trouve notre esprit, là où se trouve notre esprit est notre potentiel d’Éveil. Les situations changent mais la nature de Bouddha en nous reste immuable. En établissant le relais avec les qualités de l’Éveil, c’est-à-dire en nous reliant constamment aux Trois Joyaux, nous demeurerons au cœur même de la sagesse. Dès lors, le jalonnement des histoires ordinaires de la vie ne saura plus ébranler la paix qui aura fait son nid dans notre esprit.

Pratiquer

Les sadhanas, tout comme les rituels et les prières peuvent faire partie d’une pratique quotidienne, mais si le comportement intérieur est perturbé par un émotionnel négatif, cela équivaut à souffler dans le vent. L’intention agit comme une action. Nous devons être attentif aux résultats de toutes les actions que nous engageons au travers de nos pensées, de nos paroles et de nos gestes. Pour ce faire, il est bon de nous rappeler des Dix actions vertueuses à engager (protéger la vie, partager ses ressources, fidélité et tempérance, être vrai, réconcilier, dire des paroles bénéfiques, ne pas trop parler, penser à l’impermanence, développer l’amour et la compassion, s’exercer à comprendre le sens véritable de toutes choses), des Huit comportements mondains à éviter (désir des choses matérielles, désir d’être heureux, désir d’être admiré, désir de bonne réputation et souhaiter ne pas connaître leur contraire) et des Six perfections transcendantes à cultiver (générosité, discipline, patience, diligence, concentration, sagesse).

Retour